Acquérir un bien, louer un appartement, chercher un travail ou aborder un objet sous l’angle de sa provenance, de sa fabrication, de son impact environnemental et social, de sa durée d’utilisation et de son recyclage : nous touchons là à de multiples aspects de l’économie. Pour Maurizio Pallante, essayiste et président du Mouvement italien pour la décroissance heureuse, les jeunes doivent appréhender ces notions et prendre conscience des conséquences de leurs actions de tous les jours. Entretien.
Éduquer les enfants et les jeunes à l’économie, est-ce important ? Quels aspects devraient être abordés à l’école et pourquoi ? Je crois qu’il est important d’éduquer à la bioéconomie, dans le sens donné par l’économiste Nicolas Georgescu-Roegen au début des années 70. A savoir que chaque activité de production utilise des ressources prélevées dans la biosphère et qu’elle les transforme en marchandises qui, à la fin de leur vie utile, deviennent des déchets. Il est fondamental que les élèves comprennent que ce processus augmente l’entropie, c’est-à-dire qu’il dégrade l’énergie utilisée pour effectuer un travail. Une dégradation qu’il rapportait d’ailleurs non seulement à l’énergie, mais aussi à la matière, car tous les matériaux ne peuvent se recycler à l’infini. Les enfants et les jeunes doivent appréhender ces notions, afin d’avoir conscience des conséquences de leurs actions de tous les jours.
Comment aider les enfants et les jeunes à aborder ces processus? En leur apprenant à poser un regard critique sur leur mode de vie, en les habituant à calculer leur empreinte écologique en matière de consommation. Ils savent déjà tous qu’ils doivent éteindre le robinet quand ils se brossent les dents. Très bien. Ils économiseront dix litres d’eau. Mais combien d’entre eux savent que pour produire une escalope de veau de 200 grammes dans un élevage industriel, 3000 litres d’eau sont nécessaires ? Qu’un tiers des terres cultivables est destiné à alimenter le bétail, dont seuls 20% de la population mondiale se nourrit?
L’EDD, par les principes didactiques et les compétences qu’elle encourage, peut-elle y contribuer? Tout en admettant partager certains contenus et méthodes, je reste critique quant à la définition du développement durable. Ce concept est une façon édulcorée de définir la croissance. Il présuppose une dimension qualitative, alors que la croissance n’est que quantitative. Si par développement durable, nous imaginons l’adoption de technologies moins énergivores et moins polluantes sans remise en question du but final de l’économie qui est la croissance, alors nous sommes, comme Sisyphe, condamnés à rouler éternellement notre rocher. Réduire l’impact environnemental et énergétique de chaque produit, tout en augmentant leur nombre, revient juste à ralentir la progression de l’humanité vers l’effondrement.
Pouvez-vous nous indiquer des expériences scolaires significatives ? Il pourrait s’agir de cultiver un potager dans toutes les écoles, d’amener les élèves à calculer la consommation énergétique de leur établissement scolaire, de prendre des mesures pour réduire les gaspillages s’il y en a, de proposer de calculer l’empreinte écologique d’une famille ou de s’intéresser à l’analyse du cycle de vie des produits utilisés. Les possibilités sont nombreuses.
Interview complète (pdf)
|